La marche, premier signal insurrectionnel

Comme le reconnaissent de nombreux linguistes ou anthropologues, – au premier rang desquels André Leroi-Gourhan -, l’homme a d’abord marché avant de parler. Et dès sa naissance, tous ses efforts biogéniques vont s’orienter vers la station debout, prélude au mouvement et à la mise en avant.
Ainsi la marche à pieds (la bipédie) est-elle le premier langage universel de notre humanité.
Si je te vois marcher toi, là-bas, au cœur de la steppe, dans les premiers berceaux de notre Terre, c’est que tu es un homme… “Tu me parles“.
Avant la Parole, avant le Verbe, avant le Nom, la marche est un premier pas en direction de l’Autre… Sa reconnaissance. Cette vertu originelle de la marche est pour moi le fondement de la Politique. Car au-delà de la solitude initiale et unitaire du marcheur, la marche en appelle au rassemblement, prophétique ou désordonné, silencieux ou bavard mais au final, résistant.
En marchant, je refuse de me coucher sous le poids et le Toit du monde, je me rebelle, je donne à mes pieds le choix des armes. La marche pourrait bien être alors le premier signal insurrectionnel de notre Humanité. Après tout, les révolutions ne commencent-elles pas par des hommes qui se mettent à marcher à peu près dans la même direction ? (pour, il est vrai, souvent revenir au même point comme une révolution au sens géométrique du terme).
Ce qui est drôle, c’est que ces courtes réflexions me sont venues alors que la nuit était tombée un peu trop vite sur mon GR provençal et qu’en essayant de me repérer aux lumières des villages lointaines, je me remémorais cette courte phrase de Spinoza (Traité de l’Autorité Politique). Après avoir rappelé que les théologiens expliquaient le Péché Originel par une duperie du Diable, le philosophe se demandait en effet lui-même et non sans humour : “Mais qui donc alors aurait dupé le Diable pour commencer ?“…
Mais ça, c’est juste une question pour “nous faire marcher“ !! A coup sûr !

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